lundi 30 mai 2016

HAÏKU ET BREFS, PY DANIEL : Bulles de musique



Bulles de musique 

 

Daniel PY

éditions pippa, juin 2013



 Dans la dédicace à mon exemplaire de Bulles de musique, Daniel Py m’offre d’ « étancher une petite soif de haïkus (et autres brefs) ». Assurément, l’auteur a adopté le parti-pris de la liberté.

Une ouverture a capella

Nous voyons
des photos du concert
nous n’entendons
aucune note


qui tient l’auditoire en haleine, l’oreille tendue, prêt à capter l’aérienne symphonie :

Une flûte
joue
ses bulles
°
°
°

Tombant sur le clavier
la coupe de champagne fait
,ooo


Ponctués de malice, ces impromptus parviennent à rendre la musique visuelle alors  que le silence se fait momentanément acteur principal… jusqu’à une brusque parenthèse sonore :

En pleine nuit
l’explosion
d’une corde de harpe


Le ton est souvent léger, voire haut perché…

Vers le haut du plafond
vers le haut de sa voix
Violette la voisine
vocalise


ou bien impertinent et irrévérencieux à souhait :

J’atterris
rue des Lombards
un vieil air
sort d’une porte

J’atterris
rue des Lombaires
un vieillard
sort d’une porte
- sur le cul


Qu’on ne s’y trompe pas : entre deux pieds de nez, la gravité est bien présente aussi, teintée d’une pudique tendresse. Elle apparaît au détour d’un tanka :

Décédée d’un AVC
à trente-trois ans
cette pianiste –
fermer la radio
regarder les fleurs


Ressurgit à la faveur de quelque haïku :

Photocopiant la partition
qu’elle souhaite que je joue
à son enterrement

Pour seule musique
des oiseaux en cage –
Kaboul, deux mille un.


L’auteur n’engendre ni l’ennui, ni la mélancolie. S’agissant de la forme autant que du fond, chaque page délivre son lot de surprises saisies au vol…

Le petit chat
un moment plaque au sol
un accord de septième


tirées de la vie même, riche, multiple, colorée…

Monte et descend
le petit cochon rose
qui tourne en jouant
du piccolo


drôles et inattendues…

Grosso modo
la fanfare joue juste


Quand un hautboïste poète et un illustrateur passionné de musique se rencontrent, le cocktail ne manque évidemment pas de saveur. Tandis que Daniel Py joue sa partition, François Pouch décline la sienne, en contrepoint, et les deux voix, animées d’un semblable élan, se superposent allègrement.

Merci à l’auteur – et au dessinateur - pour tant de gaieté et de fantaisie. Cet excellent moment de lecture m’a valu de nombreux et francs éclats de rire.


Danièle Duteil, 2 août 2013

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