jeudi 6 avril 2017

GRACE KEIKO / MONIQUE LEROUX SERRES : CHIYO NI, UNE FEMME EPRISE DE POESIE



Édition bilingue français / japonais. Illustrations : Clara Payot. Pippa, 2017, 16 €.
ISBN : 978-2-916506-0.




La poésie de Chiyo ni est déjà parvenue jusqu’à nous grâce à CHIYO NI bonzesse au jardin nu (Cheng Wing fun et Hervé Collet, Moundarren) et Du rouge aux lèvres (Dominique Chipot et Makoto Kemmoku, La Table ronde). Dans ce recueil, Grace Keiko et Monique Leroux Serres découvrent la haïjin sous un jour nouveau. Elles ont choisi la plupart du temps ses haïkus les moins connus, ou les plus représentatifs de sa personnalité.
Spontanéité et fraîcheur …

Quel trésor
mais quel trésor
ces premiers rayons de soleil

Coquetterie…

On se sent belle
mais qu’est-ce qu’on est transie !
Nouvelle tenue d’été

Spiritualité…

Déjà tout en feuilles
à quoi pensent-ils ces arbres
naissance de Bouddha

Sens de l’allusion et de la métaphore…

Le papillon
se perd dans la lande fleurie T
Trace d’un rêve

Gravité…

La source est fraîche
Les lucioles s’éteignent
Il n’y a rien d’autre

(Jisei)


Si Grace Keiko et Monique Leroux Serres posent le problème de la traduction, qui comporte toujours le risque de trahir l’auteur, elles donnent à savourer une poésie toute en délicatesse, rehaussée des fines encres de Clara Payot.

Danièle Duteil





YASUSHI NOZU : ATMOSPHERE 


Yasushi Nozu


Atmosphère 







Haïkus français / japonais introduits par Alain Kervern. Imprimé au Japon, décembre 2016. ISBN : 978-4-86641-020-3.


« Qu’est-ce que la réalité ? » est la question première suscitée par le haïku, confie Alain Kervern. La démarche poétique de Yasushi Nozu, en proposant un recueil de haïkus bilingues japonais / français, est bien de confronter les différentes manières de « percevoir l’univers qui nous entoure » en rassemblant dans chaque haïku « des forces dispersées en un souffle nouveau ». Tandis que Yasushi Nozu précise sa méthode de transposition d’une langue à l’autre, « exprimant la même émotion et le même environnement que l’original japonais », sans traduction mot à mot, Alain Kervern s’étonne encore du pouvoir créateur des mots, qui constitue pour lui l’essence même de la poésie.
Lever des haltères
La mante religieuse se hausse
Sur la pointe des pieds
Danberuya Tourousenobi Shitewitari

Bel après-midi où
Je n’ai rien du tout à faire
Papillon d’hiver

Nanimoshinai Haretahinogogo Fuyunochou

Pour les Japonais qui maîtrisent le français ou les Français qui connaissent le japonais, le plaisir de la lecture sera double, voire triple, car un ouvrage bilingue provoque aussi naturellement une riche réflexion sur le travail de traduction.
Danièle Duteil





DANDEVILLE / GILLET - GRAPPES DE HAÏKUS


Annick Dandeville / Patrick Gillet

Grappes de Haïkus  / Haïku fusa-fusa / A bunch of haïkus



Phot. : J.-Y. BARDIN –Trad. japonaise : H. Trochet – Trad. anglaise : B. Sohbi – Éd. trilingue : français, japonais, anglais, Créazen, oct. 2016, 28 €. ISBN : 978-2-9558056-0-2.


Annick Dandeville et Patrick Gillet déclinent la poésie de la vigne et du vin, savoureuse et hautement colorée, égrenant en alternance les haïkus tirés de leur meilleure cuvée.

Le soleil se lève –
au flanc du coteau
l’or des vignes (A. D.)

Vendanges tardives -
dans les grains gorgés de sucre
la couleur du miel

À leurs mots, font écho de superbes photographies, non moins poétiques, évoquant différents terroirs français. D’autres vues montrent le Japon traditionnel. Les trois artistes convient ainsi leurs lecteurs à un véritable voyage, doublé d’un régal de tous les sens. Ambiances, couleurs, arômes se mêlent, sur fond de senteurs de terre et de cheval, bruit de bouchon et vapeurs sublimes. On prend sa part des anges, de bulles et d’ivresse et, quand la fête est finie, que sécateurs et guitares s’immobilisent, qu’hommes et femmes prennent un repos bien mérité, il ne reste que la lune tardive pour taquiner encore le barboteur en verre.

Danièle Duteil