KUKAÏ VANNES DU
SAMEDI 18 MARS 2017
THEME : FLEURS
ET JARDINS
Déroulement :
Ginkô (balade et écriture haïku) dans Le Jardin des Remparts,
de 11h 15 à 12h 15, sous les cerisiers en fleurs. Repas au Bagel Ouest à 12h 30.
Kukaï à 14h, suivi d’un tensaku (réécriture et
amélioration de quelques haïkus).
Les haïkus
suivants ont été remarqués :
Glissades
Le petit garçon redessine
les allées du jardin
(Evelaine, 3 vx)
un pleur d’enfant
sous les cerisiers en fleur
vent de pétales
(Danièle, 2 vx)
Affolement des mouettes
assis sur une cheminée
le chef d’orchestre
(Evelaine, 2 vx)
deux couples déjeunent
sous les cerisiers en fleur
parlant divorce
(Danièle, 2 vx)
pluie de pétales
sous les cerisiers en fleur
adieu à l’hiver
(Michel, 1 vx)
ce matin enfin
les jonquilles ne sont plus seules
cerisiers en fleurs
(Michel, 1 vx)
Tensaku
1)
Au pied des remparts
sous le vent tremblantes
les fleurs neigeuses des cerisiers
(C.)
Dans ce haïku les oppositions constituent des éléments
fondamentaux : force / fragilité et permanence / impermanence (remparts /
fleurs).
Mais les adjectifs sont trop nombreux : l’élagage
renforcera chaque mot, ainsi que l’ensemble.
Au pied des remparts / sous le vent tremblantes
/ les fleurs neigeuses des cerisiers
En supprimant les adjectifs, on évite la redondance :
le haïku réclame de la concision.
Dernière remarque : un kireji (césure) serait
bienvenu pour donner du relief. Il s’agit-là d’un constituant clé du haïku. Il
correspond à une rupture du rythme, un « pas de côté » en quelque
sorte, qui déstabilise légèrement le lecteur / la lectrice. Peut-être pour
rappeler que rien en ce monde n’est définitif ou acquis ?
Remparts –
Les fleurs de cerisiers
tremblent
C. préfère marquer le kireji par un tiret. Pourquoi
pas ? On notera cependant que toute ponctuation (ou autre marqueur :
la majuscule en est un aussi) signe l’irruption de l’auteur(e) dans le texte,
gommant la neutralité et orientant la lecture. Pour la même raison, le « je »
devrait s’effacer. Cependant, il figure dans de nombreux haïkus. Rien n’est
interdit, mais il vaut mieux que le « je », s’il est présent, soit
discret et se fonde dans l’ensemble. Ex. : cueillant des champignons / ma
voix / devient le vent (Shiki). A moins qu’il introduise l’autodérision.
2)
Jonquilles et fleurs bleues alignées
Frondaison blanche et ronde
du magnolia solitaire (C.)
On apprécie, dans ce haïku le contraste entre un monde
ordonné d’un côté, et beaucoup plus fantaisiste de l’autre ; entre le
nombre (L1) et la solitude (L3) – du / de la poète ?
Il reste à tailler dans le vif, afin de mettre en
avant les éléments importants. Jonquilles et fleurs bleues alignées / Frondaison
blanche et ronde / du magnolia solitaire
Et à donner plus de corps au haïku, en ménageant un petit
effet de surprise en L3 :
Jonquilles alignées –
La blancheur
du magnolia solitaire
Dès lors, le magnolia se trouve magnifié, devenant
presque « personnage principal », avec sa caractéristique physique
propre (sa blancheur = pureté, candeur, beauté, fragilité) et son tempérament
(solitaire).
On le voit, le haïku épuré offre une possibilité d’échange
entre l’auteure et le/ / la lect-eur / -rice. Si tout est dit, le dialogue ne
peut pas s’instaurer.
3)
jour de printemps
prendre des photos en couleur
jardin des remparts (M.)
L’effet « liste de courses » est un peu
gênant ici. Il vaut mieux lier entre elles deux « images » afin de
les fondre en une seule. Simplement en commençant L3 par « au »,
peut-être.
Le groupe fait encore remarquer qu’il serait plus
habile d’opposer grisaille et couleur :
fin d’hiver
prendre des photos en couleur
au jardin des remparts
L’auteur reste neutre, son impatience et sa
détermination transparaissent simplement dans l’emploi de l’infinitif en L2 et
la précision « en couleur ».
4)
pluie de pétales
sous les cerisiers en fleurs
adieu à l’hiver (M.)
Attention aux redondances telles que « pluie
de pétales » et « adieu à l’hiver ». Il faut éliminer un mot de saison. D’ailleurs, L3 devrait
constituer la conclusion du lecteur / de la lectrice, plutôt que celle de l’auteur,
qui manque ici à sa neutralité de mise. Sans dommage, L3 peut être supprimé et
remplacé par autre chose, par exemple « cri des mouettes ». Du même coup, le poème fait appel à un
deuxième sens (l’ouïe), et l’auteur ménage une ouverture intéressante :
pluie
de pétales
sous
les cerisiers en fleurs
cri
des mouettes
5)
La voiture jaune passe
La porte s’ouvre aux factures
Soudain les narcisses (C.)
L’auteure n’est pas satisfaite de la formulation de ce
haïku. Il manque en effet de limpidité.
On hésite entre « passage de la voiture jaune »
ou la proposition originale, pour finalement s’arrêter sur « voiture jaune »,
c’est-à-dire la voiture du facteur que tout le monde connaît.
En L2, C. aimerait « Marre des factures »,
se demandant toutefois si l’expression n’est pas trop familière. De l’avis des
autres, elle suggère bien le sentiment de lassitude qu’inspire la vue des
éternelles factures dans la boîte à lettres, au lieu du courrier espéré. Elle
permet de surcroît une belle économie de mots.
Voiture jaune –
Marre des factures
Soudain les narcisses
Le prochain « Kukaï-Vannes » se déroulera le
samedi 22 avril 2017 à 16 h au Bagel Ouest. Au plaisir de vous y retrouver !
Danièle Duteil
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